Droit Propriété intellectuelle
Actualité juridique 01 décembre 2021

Actualité juridique : Attribution gratuite d’actions et opérations sur le capital

Par Ydès

Une société par actions simplifiées peut attribuer gratuitement des actions à ses salariés (ou certaines catégories d’entre eux) ainsi qu’à ses mandataires sociaux.

Pour rappel, l’attribution gratuite d’actions comprend deux périodes dont l’assemblée générale extraordinaire détermine la durée minimale, avec faculté pour le Président de l’augmenter, le cas échéant :

 

  • La première période dite d’acquisition obligatoire, qui ne peut pas être inférieure à un an et au terme de laquelle l’attribution des actions à leurs bénéficiaires est définitive ;

 

  • La seconde période – dite de conservation – facultative, pendant laquelle les bénéficiaires ont une obligation de conservation des actions. Cette période court à compter de l’attribution définitive des actions.

 

La durée cumulée des périodes d’acquisition et de conservation ne peut pas être inférieure à deux ans.

 

Durant la période d’acquisition des actions, les bénéficiaires ne bénéficient que d’un simple droit de créance personnel à recevoir les actions dans les conditions fixées par le plan, étant précisé que ce droit est incessible jusqu’au terme de la période d’acquisition. Pendant cette période, les bénéficiaires ne sont pas propriétaires des actions. Ainsi, ils ne bénéficient ni du droit aux dividendes, ni du droit d’information des associés. À la fin de la période d’acquisition fixée par le Président, la société transfère le nombre d’actions convenu à l’origine.

 

Durant la période de conservation des actions, les actions sont indisponibles et ne peuvent pas faire l’objet d’une transmission à quelque titre que ce soit, faute de quoi les régimes social et fiscal de faveur pourraient être remis en cause.

 

À l’issue de la période de conservation des actions, les actions deviennent disponibles et peuvent notamment être cédées par leur titulaire sous réserve des dispositions statutaires et de celles résultant, le cas échéant, du pacte d’associés, s’il a été signé par les bénéficiaires.

 

Ce dispositif génère deux plus-values distinctes :

  • la plus-value ou gain d’acquisition, égale à la valeur des actions au jour de l’attribution définitive, c’est-à-dire au terme de la période d’acquisition.
  • et la plus-value de cession, égale à la différence entre le prix de cession et la valeur des titres au jour de l’attribution définitive.

 

Le fait générateur de l’imposition du gain d’acquisition et de la plus-value de cession est constitué par la cession des actions.

 

Ce mécanisme particulièrement intéressant à l’heure actuelle afin d’intéresser des managers clés est souvent plébiscité par les entreprises qui le préfèrent aux régimes concurrents des stock-options ou des BSPCE.

 

On assiste donc de façon régulière à des opérations d’OBO à mener sur des sociétés dont le capital intègre ce mécanisme d’intéressement, que ce soit en cours de période d’acquisition ou en cours de période de conservation. Il convient donc d’être vigilant dans le cadre du montage de l’opération afin de ne pas remettre en cause un plan d’attribution gratuite d’actions en cours.

 

Pour rappel, en présence d’une opération de fusion impliquant la société logeant le plan d’attribution gratuite d’actions en qualité de société absorbée, la disparition de la personnalité morale de la société absorbée entraine la disparition des actions à émettre ou émises et objet du plan. Cette situation est identique en période acquisition et en période de conservation. Toutefois, dès lors que l’opération de fusion est réalisée sans soulte, le traité de fusion peut prévoir la reprise des dispositions du plan d’attribution décidé dans la société absorbée au niveau de la société absorbante.

 

Les droits des bénéficiaires du plan seront alors reportés sur le capital de la société absorbante, en faisant application du rapport d’échange retenu pour la fusion. L’assemblée générale extraordinaire ou la collectivité des associés de la société absorbante appelée à statuer sur la fusion aura donc également à voter sur la reprise des engagements de la société absorbée en ce qui concerne les plans d’attribution gratuite. En pratique, la société absorbante devra, tout comme la société absorbée ayant décidé de procéder à une attribution gratuite d’actions, disposer des réserves suffisantes afin de créer les actions à émettre par voie d’augmentation de capital ou de racheter des actions existantes à des associés.

Dans l’hypothèse où les actions qui avaient vocation à être attribuées par la société absorbée aurait été auto-détenues par celle-ci, la réalisation la fusion entrainera l’émission par la société absorbante d’un certain nombre de ses propres actions afin de remplir ses obligations vis-à-vis des bénéficiaires du plan post fusion. La parité d’échange retenue dans le cadre de la fusion sera appliquée à cette émission.

 

Cette opération de fusion, réalisée dans les conditions visées ci-dessus, est fiscalement neutre pour les bénéficiaires du plan d’attribution gratuite d’actions. L’échange d’actions dans le cadre de la fusion n’entrainant en effet pas une « cession » au sens retenue pour déclencher une taxation, la taxation des différents gains évoquée ci-dessus n’interviendra que lors de la cession des actions reçues en échange des actions de la société absorbée.

 

En revanche, dans le cadre d’une opération d’OBO consistant notamment en un apport de titres par les associés d’une société cible au profit d’une société holding de reprise, l’application du régime fiscal du report ou du sursis permet aux associés apporteurs de ne pas supporter d’imposition au titre de la plus-value d’apport lors du transfert de propriété compte tenu de l’absence de perception d’un prix de cession susceptible de permettre à l’associé apporteur de payer l’imposition due. Toutefois, dans ce type d’opération ayant pour objet une détention intégrale du capital de la société cible par la société holding, l’apport par un bénéficiaire des actions issues d’un plan d’attribution gratuite d’actions en cours de période de conservation est susceptible, sauf exception, d’entrainer la taxation du gain d’acquisition alors même que l’opération ne génère pour lui, aucune perception de numéraire puisque la contrepartie de l’apport est constituée de titres de la société bénéficiaire de l’apport. Le mécanisme de report ou de sursis étant inapplicable au gain d’acquisition, seul le gain de cession pourra faire l’objet d’un de ces mécanisme, créant ainsi une charge financière important dans le cadre de l’opération d’OBO.

 

Dans ce contexte, il convient de ne pas procéder à l’apport des titres issues de plan d’attribution gratuite d’actions et de réalisation l’opération d’OBO en deux étapes :

  • Étape n°1: Apport ou cession par les associés non titulaires d’actions issues d’un plan d’attribution gratuite d’actions, de leurs actions de la société cible au profit de la holding de reprise. À l’issue de cette opération, la holding de reprise se trouvera à détenir l’intégralité du capital de la cible hors actions issues du plan d’attribution gratuite d’actions qui seront détenues par les bénéficiaires.

 

  • Étape n°2: Fusion entre la société cible et la holding de reprise afin que les actions issues du plan d’attribution gratuite d’actions de la société cible absorbée soient échangées en actions de la holding de reprise absorbante après réalisation de la fusion. À l’issue de cette opération, seule la société holding de reprise subsisterait et son capital serait réparti entre les associés ayant apporté des titres de la société cible et les bénéficiaires du plan d’attribution gratuite d’actions.

 

Par hypothèse, cela ne vise que les actions issues d’un plan d’attribution gratuite d’actions en cours de période de conservation dans la mesure où, e cours de période d’acquisition, le bénéficiaires d’un plan d’attribution gratuite d’actions n’est titulaire que d’un droit de créance non cessible sur la société émettrice et ne dispose d’aucun droit sur des actions déjà émises.

 

Catherine Couriol – Avocat associé – Corporate – Fusions & Acquisitions

Aurélien Provencal – Avocat collaborateur – Corporate – Fusions & Acquisitions